lundi 19 octobre 2015

Le Mauricien Umar TIMOL nous parle de LA VACUITÉ DE L'EXTASE.

Ainsi l'être ne cesse de perpétuer les extases, quelles qu'elles soient, afin d'avoir le sentiment d'exister à outrance. Sa vie est, à vrai dire, une quête incessante de l'extase à venir, il veut ainsi demeurer transi, métamorphosé, autre, n'être plus qu'un élan vers une transcendance ancrée en son corps et dans l'au-delà de son corps. Et il veut taire en lui tout ce qui n'est pas cet élan, cette quête, toutes les parenthèses de l'absence, toutes les monotonies, il veut ainsi dévier de son cours tout temps qui n'est pas extase, il ne cesse de malmener le temps, de bafouer le temps, il est d'autant plus son ennemi  qu'il avance à visage découvert, qu'il énonce son pouvoir, sa prétention à la précarité et à la toute-puissance de la pesanteur, de SA pesanteur. Et l'être procède à la mise à nu du temps, de son temps, il le dépèce de tout ce qui n'est pas extase. L'extase sera. Envers et contre tout. Et il est parvenu à vaincre ce temps, de façon éphémère, il est vrai, mais ce temps lui appartient, inféodé à ses frénésies. Du moins c'est ce qu'il se figure. Car après l'extase, qui a un caractère absolu, rien ne semble pouvoir plus être , et donc il bascule dans le vide, dans ce vide qui est, en soi et ce vide-là échappe au sens, aux mots et ce vide-là ne cesse de le démembrer, de rejeter aux quatre vents tous les organes de son âme , puis de les  broyer, de les réduire en cendres, cendres qui servent à masquer les plaies purulentes du vide en soi. Et il voudrait alors crier, hurler de toutes ses forces pour que le vide s'en aille... D'où ce temps martyrisé, le sien, temps martyrisé, asservi à la conquête d'une nouvelle extase. Ainsi  procède-t-il, du vide à l'extase, de l'extase au vide, cycle perpétuel et infernal. Et l'extase s'accouple au vide pour n'être plus qu'un seul et même corps...Et l'extase parvenue à un nouveau paroxysme suscite un vide d'autant plus intense...Et ce corps mêlé, de vide et d'extase, va toujours au plus loin de ses limites. Avant qu'un jour, le temps ne le défasse,  ce corps, que le temps ne l'inscrive dans sa matière, cette obscurité qui nous vient des contrées du deuil, avant que le temps ne lui rappelle, finalement, qu'entre le vide et l'extase, il y a place pour la lumière, la lumière ample de son déclin tout aussi bien que de sa genèse, la lumière qui l'emplit d'une joie, celle, éternelle, du sens enfin révélé.





Umar TIMOL

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