dimanche 24 août 2014

Le MANIFESTE DES MOTS de Umar TIMOL (Île Maurice) .

Et il y aura donc cet acharnement. Le seul dont il soit capable. Il ne s’arrêtera pas d’écrire, il écrira tous les jours, systématiquement, il plongera en soi, dans son corps revêtu de lagunes, il plongera dans ses méandres, ses contradictions, ses folies, il fera de la matière de son corps et du corps de celle qu’il aime des mots, il fera de tous les visages de son corps des mots, il fera de son corps un prétexte à la littérature. Et cet acharnement ne cédera à aucun compromis. Il doit aller au bout de cette chose qui est en lui, cet indicible, ce qu’il ne peut nommer, cette chose qui l’habite depuis toujours, cette chose qui a la faculté de se transmuer en mots et de devenir beauté. Il est en quête de cette beauté, il désire cette beauté, beauté qui communie avec le corps des autres, beauté qui est une possible immortalité. Il sait cette beauté mais il ne sait s’il en est capable. Ou si parfois. C’est ce qu’on lui dit. Quand la grâce veut bien le toucher. Mais il est une autre beauté, beauté céleste, faite de mots mais qui va au-delà des mots, beauté inaccessible, à tout jamais peut-être mais il s’efforcera de l’étreindre, de l’accaparer. Cette quête a un prix. On n’y parvient qu’en faisant l’offrande de son corps, en le sacrifiant sur l’autel de la discipline, de l’acharnement. Mais il est prêt désormais. Son désir a subi sa mue. Il a éloigné ses démons, le doute, la comparaison, la peur, il les a relégués dans ses obscurités. Ils surgiront de temps à autre mais il est désormais bien armé pour les dissiper. Il en va après tout du sens de sa vie. Il s’agit donc parfois de douter mais le doute doit être le ferment de l’écriture. Il s’agit de comparer mais de se comparer avec soi-même. Il s’agit d’avoir peur mais une peur qui génère les mots. Il est désormais prêt. Il est rendu à la nudité de son désir. Il est désormais un enfant. Il est au seuil des mots, cette étendue sans frontières et il délasse son corps, corps devenu fluide qui se mêle au fluide des mots, corps devenu mots, mots devenus corps.




Umar TIMOL.



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